dimanche 27 juin 2010

Des gars dans la cuisine

L'araignée de Louise B.

Hier, ils sont arrivés tous les deux avec des bidules mitonnés maison : une salade très fraîche-bien assaisonnée, des moelleux au chocolat (dans des petites caissettes plissées en silicone), de l'ananas frais joliment découpé - et des piques en bois pour ne pas se salir les doigts.
Je porte un regard très attendri sur les garçons qui cuisinent - ils sont parfois un peu maladroits, toujours très appliqués. Autour de moi, je n'ai jamais eu de gars en cuisine.

Can we grab some food? C'est plutôt à ça que je suis habituée. Dire que même les petits gestes empruntés de M. qui découpait des tomates pour agrémenter une pizz' du frigo me faisaient sourire. Parfois, je ne peux réprimer mon dégoût devant les abonnés au surgelé - toujours : "Tu sais, ça peut être bon. Et puis la cuisine, c'est une perte de temps " J'ai aussi dû m'appliquer à ne pas vexer celui qui, tout fier de son gâteau cru-immangeable, assurait qu'il l'aimait comme ça.

Cabochard, mon père l'était aussi, à outrance, lorsqu'il servait ses plats. Il cuisait à merveille les produits de sa pêche en apnée (avec une arbalette, un chasseur des mers!) Je me rappelle surtout les araignées qu'il pêchait au Printemps. Il accompagnait les crabes rouges d'une sauce à base de leur corail. Ses talents s'arrêtaient là. (Il ne l'admettait pas, mais c'est vrai.)

mercredi 23 juin 2010

Far West



Nous avions roulé des heures sur ces routes cahotantes du Far West français. Une missive à remettre en mains propres. A quelqu'un qui vit dans un autre monde-où le téléphone a une camisole de force. Nous nous perdîmes. Nous nous gorgeâmes du paysage-au moins le trou perdu jouissait d'une folle cambrousse luxuriante. Rien à voir avec l'Arizona.

Le nom du hameau-indiqué sur une pancarte rouillée et masquée par les mauvaises herbes-fleurait bon l'exotisme. Alerté par le bruit d'une voiture, un homme bondit hors de sa cahute au toit de tuiles. Il dévisagea les intrus d'un air mauvais. Il ne nous lâcha pas du regard le temps d'un demi-tour nerveux. Il était posté-là, silencieux-comme sur ses gardes. Il ne lui manquait qu'une carabine. L. proposa de faire un pied de nez-et de tirer la langue. Nous n'en fîmes rien.



Laurie Colwin est un auteur que je ne me lasse pas de relire. J'aime tout d'elle, et encore plus-je crois, Accidents.
Le bestial serviteur du pasteur Huuskonen de Arto Paasilinna me fait beaucoup rire, c'est une lecture parfaite pour le métro-mais qui n'en serait que plus délicieuse sur une plage.

vendredi 18 juin 2010

I find shelter


Il y eut le soleil sur ma peau, le sel dans ma bouche, l'eau glacée qui transit puis qui berce. Les petits pas mutins de Jean sur le parquet. Le vin sur la terrasse et la lumière du soir filtrée par les feuilles. La douceur de L. toute mâtinée d'autoritarisme. Son irascibilité. Avant, je lui faisais écho. Tu dis toi aussi que je ne lâche rien. J'ai l'impression d'avoir changé. Tu verras, la prochaine fois, tu pourras parler autant que tu veux, je laisserai couler. Je ne suis pas sûre que ça te plaise. Tu diras "U, tu peux me faire une éploration en allemand?". Et je rejouerai pour te plaire la petite scène de la Lenbachhaus. J'ai l'impression de me perdre un peu.

mardi 15 juin 2010

J'irai cracher sur D&G


Santiag

J'ai fait à H. le signe de reconnaissance. Il m'a répondu d'un : C'est à cette heure-ci qu'on rentre? Je crois que j'ai souri. Oui, tu as raison il m'arrive de sourire quand je ne sais pas quoi faire d'autre-mais pas que.

Je portais tous les stigmates de la fille habillée comme hier. A mon poignet seuls manquaient la chaînette entremêlée des deux liens de cuir. Et je sais pourquoi à la station Liège, personne ne monte ni ne descend jamais. (As-tu toujours froid? Je me demande si l'emploi de toujours au sens de encore est correct.)

La douche interminable et glacée n'expia pas mes entorses au code. J'enfilais un pull rouge-je crois que le rouge me donne un joli teint ; et ce soir je mettrai du rouge à lèvres rouge, comme Juliette Binoche dans Copie Conforme de Kiarostami.

Ce film m'a embarquée ; J.B a un jeu ciselé comme un rasoir. V. a aimé aussi. En lisant-après-les critiques des spectateurs sur All*ciné-qui eux dénoncent en majorité un film rasoir, je les ai tancés à voix haute "Ils ne comprennent vraiment rien, ces gens".

samedi 12 juin 2010

Clic-clac

Le plan du métro tokyoïte. Tokyo-juste après Rio. Oui, vite!

Les gens qui truffent leurs phrases de clichés m'agacent. Mais je me tais-sinon ils prendraient la mouche.


Cliché : 1 - n.m. Mot ou locution formant image, et qui est répété sans réfléchir. (...) A force de répétition, l'image est devenue invisible. (...) L'origine du cliché est ignorée pour la plupart de ceux qui l'utilisent. (...)


In Dictionnaire égoïste de la littérature française, Charles Dantzig

Mais depuis quand ai-je arrêté d'être exigeante? A force de survivre au pire, j'ai l'impression que je me suis habituée au médiocre. Ca ne fonctionne pas. J'ai recherché des réconforts aussi vains et écoeurants qu'une marmite géante de mousse au chocolat. J'ai replongé la cuillère dedans-consciente que ça n'était pas bon. Je me suis même auto-convaincue d'une addiction factice. A m'en rendre malade. A m'engluer dans cette odeur âcre qui me collait-m'engluait, me parasitait. J'ai frotté, frotté, j'avais l'impression qu'elle était incrustée. Je ne veux plus jamais la sentir.

Même après le velib, V. sentait bon, lui-je le sais, il m'a demandé de le humer. Il a commencé une blague en disant que ce n'était pas ça du tout et puis encore et encore. C'était un tel flop-mais un flop génial, un Grand Flop.

Nous étions un peu moins enjoués lors de notre dîner dans le microscopique japonais Asuka -à notre arrivée. Pourtant, notre état flottant se dissipa avec les sushi et la bière japonaise, laissant place à notre complicité, qui se renforce encore, après toutes ces années. La petite dame au service et ses gestes de marionnette nous ont ravi. Elle nous a montré fièrement qu'Asuka avait été cité dans Elle... Heureusement qu'elle n'a que 4 tables, sinon finie, la quiétude de sa petite échoppe de bric et de broc! Son mari, le cuisinier au visage aux douces rides, nous serra la main avant de partir. Vraiment Grand, Asuka.

jeudi 10 juin 2010

Rire-Rêve

Lorsque je me couche tôt et qu'au lieu de me vautrer dans un sommeil lourd ou combattre l'insomnie- ce qui arrive lorsque l'heure est trop tardive- je me repais alors d'un état de langueur, propice au rêve.
C'est très drôle, je suis très souvent tirée de mon repos par un rire-mon propre rire. C'est toi qui me fais rire. Parfois ce sont tes mots, parfois ce sont des mots rêvés qui sortent de ta bouche. Peut-être me les diras-tu un jour.

Une autre chose que j'aime bien : être tirée de la brutalité du monde par un bidule doucement surprenant*.
Par exemple, un clodo tout rougeaud qui m'a regardée arriver, et puis qui, tripotant une petite voiture de ses gros doigts demande "Une pièce pour mettre de l'essence dans ma petite bagnole s'il vous plaît?". Ca m'a émue, j'en ai ri.
Une autre fois, avec Dee, après avoir subi l'accueil terrible du type d'Un Loir dans la théière (boycottons ce bouge), nous sommes restées toutes coites, et des étoiles dans les yeux devant la prévenance des petits serveurs anglais (surtout un) de chez Rose Bakery. Un petit bon plan-pour les "causettes" : demander le "ptit" vegetable bowl-il n'est pas sur la carte.
(*En général, c'est le contraire qui arrive, un moment délicat, un charme rompu par une révélation ou une brusquerie qui bâche direct, qui casse, qui broie tout.)

dimanche 6 juin 2010

Oh bigre!

"Vos parents ne vous bouclent tout de même pas, si?"

"C'est un peu concept, non?" -levai-je le sourcil en entrant le 3 pièces cuisine rue des Dames. Un comptoir jaune et vert, des tables pourpres constellées de petites tâches "vielli". Un staff qui me rappelle un peu le mien chez American Apparel-en moins gay, et moins jeune. Très gentil. La serveuse a un joli tablier rouge à pois blanc et un apocalipstick assorti. Les garçons sont bruns et beaux.
Il m'a dit "Je t'ai pris le meilleur". J'avais commandé un verre de blanc et j'ai voulu regarder la carte. C'était seulement sur l'ardoise.
Après, c'est moi ai commandé et j'ai pris un sauvignon-j'en ai profité pour discuter un peu avec le serveur-celui avec les cheveux bruns et bouclés-il avait très faim et mangeait au comptoir. Il avait cette simplicité un beu brusque qui surprend au début.
Nous re-tentâmes le Oh bigre-la première fois c'était rempli-et quelqu'un avait soufflé su notre passage "Laisse-passer, c'est l'endroit le plus branché de Paris, il faut le mériter". A part ça, c'est un endroit très chouette.

J'ai mis la Boulangère de Monceau en illustration parce que l'intrigue se passe dans le quartier et le garçon pérégrine pas mal dans toutes ces rues-là, Levis, Saussure, boulevard des Batignolles. Je n'en dis pas plus, parce que ça doit être un peu barbant à la longue, que je n'en finisse pas sur les petits Contes Moraux. A propos, L'Amour l'Après-midi est maboulement bien, il faudrait que j'en dise un mot, hihi.

jeudi 3 juin 2010

C'est gentil chez toi


Chez lui, on trouve un fer à repasser Rowenta, une machine à laver Laden et toute une collection de chocolats noirs Côte d'Or dans le placard-et un Lindt (mon favori est celui aux fruits de la passion, qui pique un peu la langue. Je crois que je n'ai jamais goûté ce fruit au nom de frasque.)
Ca ressemblerait presque à une chanson de Vincent Delerm- qu'il honnit. Mais moi j'aime.
Comme il commence à faire chaud, il ouvre la fenêtre et ferme les volets. Le bruit de la rue me dérange- une rue du 17e arrondissement où je vois passer beaucoup de jeunes pères qui poussent des poussettes remplies de petits à la tronche boudeuse ou blasée.